EXPLIQUER LA MORT AUX ENFANTS

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EXPLIQUER LA MORT AUX ENFANTS

 

La mort est une phase terminale inéluctable de la vie, un sujet indigeste même pour les adultes. Les enfants, inapte à percevoir les concepts abstraits, ne peuvent ordinairement comprendre la mort. Effectivement, les parents qui ne savent pas comment aborder le sujet, peuvent être réticents et éviter d’expliquer l’acheminement vers la mort à leurs enfants ; ou dans le cas contraire, ils peuvent aborder le sujet de façon très maladroite causant ainsi involontairement des marques profondes dans l’esprit de leurs enfants.

Parfois, ne pouvant expliquer clairement la mortalité, les parents optent l’emploi des termes ambigus, tels que : « Ton oncle est parti en voyage » ou alors « Ta mère s’est endormie ». Dans ce cas, l’esprit de l’enfant risque d’associer la mort au voyage ou au sommeil. Cette analogie établie provoque une peur face aux évènements cités. Les enfants peuvent donc développer une phobie de la nuit ou une insomnie.

Une autre erreur consiste à employer des mots dangereux, tels que « Ta mère était une si bonne personne que Dieu l’a emmenée avec elle ». Cette explication s’installe dans le subconscient de l’enfant et suscite de telles questions : « Dieu a-t-il tué ma mère ? », « Les bonnes personnes sont-elles punies ? »

Parfois, les parents n’annoncent pas le décès d’un proche à leur enfant. L’enfant, ne pouvant percevoir la mort en raison de son jeune âge, sera toujours en attente du retour de la personne défunte. Cette attente interminable crée un processus fastidieux pour l’enfant. C’est une grosse erreur de ne donner aucune explication à l’enfant lors de cet incident. Si l’enfant ne trouve pas de réponses satisfaisantes dans son esprit, il peut poser ces questions à d’autres personnes. Recevant des réponses erronées ou incomplètes, son esprit sera alors encore plus confus.

Lorsque le sujet de la mort arrive à l’ordre du jour, un langage clair et simple doit être utilisé ; il ne faut surtout pas expliquer par inadvertance les détails qui dépasseront la curiosité des enfants, donc inutiles. Au cours de ces évènements difficiles, les parents peuvent essayer d’adoucir le concept de mort avec des mots tels que « mort » et « migrant ». Cependant, pour les enfants qui ne sont pas en situation de comprendre les métaphores, ces expressions ne peuvent que rendre la situation plus abstraite et compliquée. Par conséquent, le mot « mort » doit être utilisé clairement.

Lors des explications au sujet de la mort, les émotions affectent le mental d’un enfant, bien plus que les mots ; utiliser un ton anxieux lors d’une explication peut rendre l’enfant d’autant plus nerveux. C’est pour cette raison que la personne qui est chargée de cette mission doit être aussi calme et tolérante, dans la mesure du possible. Cet état ne rime certainement pas avec robotiques et sans émotion. Abordant le sujet, elle doit expliquer qu’elle est aussi désolée pour cette situation ; elle peut parler du défunt et se remémorer les souvenirs du passé. Ainsi, l’enfant se sentira ainsi : « Je n’ai pas besoin cacher et garder mes sentiments pour moi, je peux les partager ».

Durant les explications, il est possible de mettre l’accent sur les changements dans la nature en soulignant que tout début a une fin. Dans un langage clair, les faits suivants peuvent être exposés : les feuilles tombent à l’automne, mais fleurissent en été. Une chenille subit de divers changements jusqu’à devenir un papillon. Les humains subissent aussi de tels changements et finissent par mourir.

Énoncer le décès d’un parent à un enfant peut s’avérer être beaucoup plus difficile. Au vue de la gravité des faits, la nécessité de déléguer cette responsabilité à un spécialiste peut se faire ressentir. Cependant, l’annonce la plus saine pour les enfants serait d’entendre cette triste nouvelle par la personne la plus proche, et non un étranger. Par exemple, pour le décès de mère, il serait convenable que l’annonce soit faite par le père ; et vice versa. En cas de perte des deux parents, il est préférable de laisser la personne la plus proche, comme le grand-père, la grand-mère, la tante ou l’oncle, se charger de cette fonction.

Face aux questions de la vie après la mort, l’enfant peut être réconforté en utilisant le terme « paradis ». Cependant, si le sujet est beaucoup abordé avec exagération alors l’enfant voudra y aller le plus tôt possible, c’est pourquoi le paradis doit être décrite par des phrases courtes et simples.

Le lieu où se déroule cette déclaration restera ancré dans l’esprit de l’enfant, et peut même devenir un lieu traumatisant. Pour cette raison, l’endroit choisi ne doit pas être un endroit où l’enfant se rend régulièrement. Dans cette perspective, il est préférable de choisir un espace ouvert où il peut respirer facilement, ce qui le rendra moins anxieux.

Après avoir donné les explications nécessaires, diverses méthodes telles que la rédaction d’articles décrivant les sentiments de l’enfant, la peinture, la plantation d’arbres pour commémorer les morts, l’écriture de lettres aux morts, la prière pour les morts, la lecture du Coran peuvent être utilisés pour que l’enfant puisse faire son deuil et exprimer ses sentiments. En plus de ces méthodes, des activités de jeux libres peuvent permettre à l’enfant d’exprimer ses peurs et ses inquiétudes.

Des livres doivent également être utilisés pour que les enfants puissent exprimer leurs sentiments. Le livre de Marge Eaton Heegaard « J’ai perdu une personne proche » est un livre qui peut être lu avec des enfants et raconte en même temps le processus de la mort. Le dessin et la narration est utilisé pour raconter la mort aux enfants. De plus, les livres tels que « Comment était mon grand-père ? », « Ma mère est partout » peuvent également être lu pendant cette période.

Lorsque l’enfant dit que la personne décédée lui manque, il faut adopter une attitude réconfortante en disant : « C’est normal que cette personne très chère te manque. Elle me manque aussi. Allons regarder ensemble ses photos. » Préparer un album spécial pour la personne décédée, remémorer de bons souvenirs à son sujet, visiter sa tombe et prier pour elle peuvent soulager le manque de l’enfant. Il ne faut pas le réconforter en disant « Elle est déjà là avec toi ; Elle te regarde et te voit tout le temps. », car ce sentiment d’être toujours surveillé sera adopté par l’enfant et pourrai engendrer une anxiété accrue.

En plus d’exprimer ses sentiments, il est également important que l’enfant puisse reprendre ses activités quotidiennes au fil du temps. Par exemple, un enfant habitué à être déposé à l’école par son père devrait être déposé par son grand-père ; de même un enfant, dont la boîte à lunch était préparée par sa mère devrait voir sa sœur aînée accomplir cette même tâche régulièrement. Ainsi le nouveau style de vie de l’enfant se dessinera à ses yeux.

Tout en fournissant les explications nécessaires à l’enfant, il ne faut pas oublier que différentes questions peuvent apparaître dans son esprit, afin d’y être préparé. En répondant, il faut veiller à être honnête, donner des explications simples et claires contenants des informations de base et à ne pas mentionner de détails inutiles. Face aux questions dont les réponses sont méconnues, la meilleure réplique est : « Tu viens de me poser une très bonne question. C’est normal de poser cette question. Mais je n’y avais pas pensé avant, et maintenant je ne sais pas comment te l’expliquer. Pourrais-tu me donner un peu de temps pour que je puisse chercher la réponse ? ».

Une autre question qui revient fréquemment est : s’il est judicieux d’emmener les enfants aux funérailles. La réponse à cette question varie selon le tempérament, l’âge ainsi que de la façon dont l’enfant perçoit et traite les événements. En revanche, aux sujets des enfants en bas âge, autrement dit préscolaires, ne pas les emmener aux funérailles est le meilleur choix. Pour les élèves du cycle primaire, les funérailles représentent une cérémonie d’adieu ; s’ils le souhaitent, ils peuvent y participer. Cependant, il faut veiller à ce que l’enfant assiste à la cérémonie avec un peu de retrait et ne sois pas témoin de l’enterrement. Dans le cas échéant, emmener de force un enfant à des funérailles peut engendrer un traumatisme.

Le processus de deuil est une phase difficile pour les adultes et les enfants. En cas de graves changements observés chez l’enfant au cours de ce processus, l’aide d’un spécialiste est fortement recommandé.

 

Hürrem IRMAK